Les Espaces du Livre / Spaces of the Book

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Remerciements / Acknowledgements

Cet ouvrage a été publié avec le concours des institutions suivantes :

– Agence Nationale de la Recherche (France). Programme
ANR LEC 10-CREA-009.

– Centre de Recherche en Poétique, Histoire Littéraire et Linguistique (CRPHLL), Université de Pau et des Pays de l’Adour (France).

– Trinity College, Université de Cambridge (Royaume-Uni).

Il a pu être réalisé grâce à la précieuse aide de Muriel Guyonneau et de Marie-Manuelle Marcos, secrétaires du CRPHLL.

Nous leur adressons nos vifs remerciements.

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Liste des illustrations / Illustrations

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Introduction

Le colloque international Les Espaces du livre : supports et acteurs de la création texte/image (XXe–XXIe siècles) a été organisé dans le cadre du programme « Le Livre : Espace de Création » (LEC)¹, financé par l’Agence Nationale de la Recherche (France), et il est né d’une collaboration entre Trinity College (Université de Cambridge, Royaume-Uni) et le CRPHLL (Université de Pau et des pays de l’Adour, France).

L’objectif de notre recherche sur « Le Livre : Espace de Création » est d’interroger la fonction du livre en tant que support ou vecteur de la création, aussi bien littéraire que plus largement artistique, dès lors qu’il associe au lisible une dimension visible, qu’il fait dialoguer texte et image. La forte présence de l’image dans les publications du dernier tiers du XIXe siècle² a joué un rôle considérable dans la façon dont on envisage ensuite le livre, qu’il s’agisse du « livre de luxe » destiné à la bibliophilie, ou du « livre pauvre », tout autant que de la revue ou du catalogue. Il s’agit non seulement de la forme ou des formats du livre, leur aspect matériel, mais aussi de la relation entre les deux mediums (langage verbal / langage visuel) mis en dialogue ou en tension, et de la conception de chacun de ces mediums, notamment quant à leur valeur esthétique. La typographie devient un élément constitutif de la composition du texte littéraire³ dès lors polymédial. ← 1 | 2 → L’espace de la page fait l’objet d’un travail qui engage son format, son pliage, sa matière (papier-calque, papier peint, papier-miroir, etc.). En retour, le livre n‘est plus seulement un objet à lire mais il est aussi à voir, dans une conception architecturale de sa forme⁴. Il est devenu un espace mobile à manipuler autrement, dès lors qu’il se fait éventail ou paravent par le pliage en accordéon, dès lors que nulle reliure n’impose d’ordre à la lecture des feuillets simplement rangés dans une boîte, ou que la disposition pluri-orientée du texte et de l’image invite à tourner le livre, avant de tourner la page. Il n‘est plus seulement un objet à acheter en librairie ou à consulter en bibliothèque : il s’expose⁵ dans les galeries ou dans les musées ; il n’est plus seulement un objet de bibliophilie mais il est aussi diffusé massivement.

De fait, le « livre » dont il est question dans le présent volume est à entendre dans un sens large. Il concerne certes le livre illustré, le livre de peintre ou le « livre de dialogue »⁶, le « livre d’artiste » dans son sens spécifique qui concerne certaines productions d’artistes postérieures aux années 50. Mais nous ne reviendrons pas sur les fluctuations de cette terminologie analysées par Anne Moeglin-Delcroix⁷ car la problématique abordée ici invite à élargir le champ d’observation bien au-delà, à tout livre dont la conception, la production et la réception relèvent d’un acte esthétique, incluant l’album, la bande-dessinée, le photo-book, le livre documentaire et le livre électronique. ← 2 | 3 →

Cet élargissement présente le risque d’un certain disparate, risque souhaitable car il a le mérite de ne pas borner la réflexion par des catégories institutionnalisées alors que ce qui nous intéresse est la plasticité de ce que l’on pourrait appeler livre de création. Il s’agit en effet d’observer ici les processus d’élaboration de nouvelles formes du livre, à partir des lieux et des contextes qui favorisent leur émergence, et donc aussi la façon dont les formes et les fonctions se créent et se modifient l’une l’autre. La définition du champ d’observation s’est en revanche construite autour de cette question de la mise en scène ou de la « mise en livre » du lisible et du visible, dès lors qu’ils participent d’une dynamique créative touchant non seulement le texte et l’image mais aussi le support, devenu véritable medium.

C’est ainsi l’étonnante diversité des possibilités esthétiques offertes par le support ou l’imaginaire du support, de la fin du XIXe siècle aux expérimentations les plus contemporaines, qui est au cœur de la réflexion proposée. La page – ou la double page –, le feuillet et le livre, l’écran aussi, débordent le cadre normé du codex et du livre relié (livre en éventail, leporello, recueil d’affiches, livre dressé, livre sculpté, livre éclaté, livre numérique, etc.), par l’hétérogénéité de leurs matières, de leurs formes et de leurs formats. Ils deviennent des supports actifs dans le processus de conception et de réception de l’œuvre, acquérant une pertinence sémiotique et une fonction qu’il s’agit d’interroger.

Or observer les processus de composition et de diffusion des œuvres dans leurs singularités matérielles engage à prendre la mesure du rôle des différents acteurs dans la conception du livre, non plus seulement l’écrivain et l’artiste mais aussi le typographe, le relieur, l’éditeur ou le galeriste⁸, chaque acteur pouvant lui-même être polyvalent. Marcel Duchamp, compagnon de Mary Reynolds⁹, participait à la conception des reliures de son atelier¹⁰. Il ← 3 | 4 → est l’auteur de la couverture de La septième face du dé de Georges Hugnet¹¹. Les typographes Guy Levis Mano, Jan Tschichold ou Robert Massin sont aussi écrivains. Jean Dubuffet et Pierre Lecuire se font éditeurs. Les écrivains et artistes assurent, comme Pierre Lecuire, Michèle Métail ou Julien Blaine, la scénographie de leurs œuvres exposées ou performées. La porosité des frontières entre les activités, les métiers, engendre naturellement la porosité entre les genres littéraires et artistiques. L’émergence de formes expérimentales ou de livres hybrides invite donc à reconsidérer les concepts d’énonciation et d’auctorialité quant à leur extension et à leur pertinence, mais aussi plus largement les délimitations du champ artistique.

Isabelle Chol et Jean Khalfa

1 Le programme ANR LEC, Le Livre : Espace de Création (10-CREA-009), a permis de fédérer les recherches de plusieurs institutions. Les porteurs du projet ont été le CELIS (Université Blaise-Pascal, 2010–2012) et le CRPHLl (Université de Pau et des Pays de l’Adour, 2013–2014). Les autres partenaires sont la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet (Paris), Écritures de la modernité (Université Paris 3), le CEREdI (Université de Rouen), le CHCSC (Université de Versailles Saint-Quentin) et Trinity College (Université de Cambridge).

2 Cf. Évanghélia Stead, La Chair du livre, Matérialité, imaginaire et poétique du livre fin-de-siècle (Paris : Presses Universitaires Paris-Sorbonne, 2012).

3 Cf. Jérôme Peignot, De l’écriture à la typographie (Paris : Gallimard / NRF, 1967), Typoésie (Paris : Imprimerie Nationale, 1993), Anne-Marie Christin, L’Image écrite ou la déraison graphique (Paris : Flammarion, 1995), Jacques Dürrenmatt éd. Calligraphie / Typoésie (Paris : L’Improviste, 2009).

4 Cf. Isabelle Chol, Serge Linarès, Bénédicte Mathios éd., Livre de poésie et jeux d’espace, à paraître aux éditions Champion fin 2015. L’ouvrage est le fruit de la recherche sur « La Spatialisation des textes poétiques » inscrite dans le programme ANR LEC.

5 Cf. Olivia Rosenthal et Lionel Ruffel éd., La Littérature exposée. Les écritures contemporaines hors du livre, Revue Littérature, n° 160, décembre 2010. Voir aussi Anne-Christine Royère, « L’espace du poème : du livre à l’exposition » (in Livre de Poésie et Jeux d’Espace, op. cit.).

6 Terme proposé par Yves Peyré dans Peinture et poésie. Le dialogue par le livre, (Paris : Gallimard, 2002). Dans ce domaine, voir aussi les travaux de Johanna Drucker, notamment The Century of Artists’ Book (New York : Granary Book, 2004).

7 Anne Moeglin-Delcroix, Esthétique du livre d’artiste. Une introduction à l’art contemporain (Paris : BNF, 2011).